Nous voici de retour au lac Powell avec le soleil ! Nous sommes sur les rives de cet énormissime lac artificiel qui doit son nom au major Powell, premier explorateur qui entreprit une expédition de survie à travers les caprices du Colorado.
La construction du barrage ayant permis la formation du lac, tout comme pourrait l’être éventuellement la 3ème guerre mondiale, a démarrée quand le président américain de l’époque, Dédé Eisenhower, a appuyé sur un petit bouton depuis une salle de la maison blanche.
Ce lac, en 17 ans de remplissage, a englouti les méandres du Glen Canyon se donnant ainsi un aspect tentaculaire non conventionnel. L’eau y a fait parler d’elle ces derniers jours. Il s’est apparemment abattu deux ans de précipitations en l’espace d’un mois sur la région. Notre virée en bateau, avec le club du troisième âge, dans laquelle un audio guide nous apprend tout de même comment tirer la chasse sur le bateau, ne nous permet donc pas de rejoindre l’arche de pierre naturelle surnommée la « Rainbow Bridge ». Une absence palliée par un nombre incroyable de véritables arc-en-ciel se formant dans le ciel tout au long de notre séjour ici.
On découvre cependant deux branches du lac nommées Antelope Canyon et Navajo Canyon. La première a la particularité d’avoir été formée par des crues subites qui ont creusées les parois au cours du temps par des balayages incessants d’eau, de sable, de roche et de débris, ramenés lors de violents orages. Large de plusieurs mètres au niveau du lac, ce canyon remonte et se resserre en entonnoir au fur et à mesure, ne laissant la place qu’à une ou deux personnes de le traverser en même temps.
Mais c’est précisément à ce niveau là qu’il est possible de le découvrir à deux reprises en se retrouvant au milieu de parois lisses extraordinaires, comme drapées de soie et sculptées finement en une sorte de coquillage géant.
C’est dans le Upper Antelope Canyon tout d’abord, fonctionnant en flux tendu touristique assez désagréable, que nous admirons ces incroyables formations mises en valeur lorsque le soleil est au zénith et quand la lumière arrive à pénétrer dans cet étroit canyon.
Les guides nous donnent leurs observations avisées des aspects formées par les roches. Aux States, ils y voient des bisons et des ours. En Asie, ils y voyaient des éléphants et des bouddhas. En France, on y verrait des bouteilles de pinard et des pains de campagne. M’enfin bref… Assise contre la paroi, un papillon de nuit au visage masqué a en tout cas suivi leurs précieux conseils pour prendre son envol.
C’est au-dessus du Lower Antelope Canyon ensuite, en partie fermé pour cause d’inondations, que nous empruntons une échelle nous entraînant au fond de ce monde assez fantastique.
La ballade, plus agréable et moins cadrée, serpente et se resserre de plus en plus mais l’on se retrouve bloqué par le niveau de l’eau et obligé de faire demi-tour. Ce canyon, sujet aux inondations surprises et rapides, est finalement bien dangereux en cas de mauvais temps. Des touristes, en majorité français, ont été emportés et noyés lors d’un violent orage en 1997. Et vu la configuration des lieux, on comprend qu’il est presque impossible de s’en sortir.
Si l’on revient à la croisière sur le lac Powell, le deuxième endroit visité est le Navajo Canyon, riche en histoires. On y observe, comme sur les autres 3000 km de rives, ce qu’ils appellent la marque de la baignoire et le niveau maximum que le lac a atteint par le passé.
Au 19ème siècle, ce canyon a été le refuge des indiens Navajos ayant fui l’oppression des troupes américaines, emmenées par Kit Carson, qui avaient décidées de reprendre logiquement ce qui ne leur appartenait pas. Les villages et les récoltes ont été brulés. La moitié des tribus a été capturée et forcée d’entreprendre la Grande Marche jusqu’au Nouveau-Mexique. La plupart des indiens périrent. Une page noire de l’histoire américaine mais, à ce rythme là, il serait temps d’écrire un bon black book made in U.S.A.
On y voit cette paroi imposante nommée tapisserie Navajo sur laquelle le vernis noir du désert dégouline en formant des peintures et des formes ouvertes à l’imagination.
De retour à quai, on se dirige vers le dernier endroit admirable du coin : le horseshoe bend. Ici, l’eau verte profonde du Colorado s’enroule autour d’un énorme piton rocheux et offre une vue prenante à mesure que l’ombre s’estompe et que la forme de fer à cheval du fleuve se découvre.
Un endroit bien passionnant que ce lac Powell. Redescendons maintenant le cours du Colorado et allons rejoindre une autre merveille, naturelle cette fois-ci, englobant toujours ce célèbre fleuve : le Grand Canyon.